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11 septembre 2009 5 11 /09 /septembre /2009 12:45


Qu’est-ce qui peut réunir des concepts aussi différents que la dette publique, la nation ou encore la littérature ?

Rien en apparence si ce n’est qu’Ils font partie des évidences universelles qu’il paraît iconoclaste de tenter de revisiter à l’aune de la modernité.

Par exemple qui contesterait aujourd’hui que c’est le devoir des états de ne pas trop s’endetter pour ne pas ruiner les générations futures ?

Le principe selon lequel "toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation" est inscrit dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen et il y a cette certitude que nous devons vénération à la nation sans bien sûr que l’on prenne le soin de se demander ce dont on parle.

Ou encore cette absolue évidence que la littérature est faite de mots écrit sur du papier avec plus ou moins de ponctuation qu’il suffit de lire et de laisser aller son imagination.

En fait nous nous arc-boutons sans cesse avec gravité sur des valeurs ancestrales présentées ou plus simplement vécues par nous comme immuables, comme les fondements de ces certitudes sans lesquelles nous craignons de perdre pied.

Pour autant ces valeurs ancestrales, ces axiomes inébranlables, ces certitudes indiscutables sont-ils à ce point intouchables qu’il soit interdit d’au moins s‘interroger sur leur signification ou plus encore de contester leur pertinence pour certains d’entre eux ?

Prenons le cas de la dette, comme le fait avec talent Conor Clarke dans les colonnes de Slate.fr. SI vous suivez les arguments assez rationnels de ce correspondant de Theatlantic.com, vous vous interrogerez comme lui sur la dette qu’ont, en fait, virtuellement, les générations futures envers nous. On nous incite (pour ne pas dire nous contraint) à ne pas trop entamer leur futur gâteau. Il s’agit, comme une évidence incontestable, de ne pas faire payer aux générations futures nos supposés excès d’aujourd’hui alors qu’ils en auront probablement les moyens avec les progrès technologiques qui ne cessent d’augmenter l’efficacité du travail des hommes. Au fond, argumente ce jeune iconoclaste d’évidences indiscutables, la démocratie nous enseigne que la société doit compenser les inégalités. Pourquoi n’y aurait-il pas une sorte de solidarité des générations futures, probablement beaucoup plus aisées que nous, pour nous aider alors que nous sommes dans l’embarras ?

Pourquoi tant de trémolos des hommes et femmes politiques sur la nation, ses valeurs, son unité (menacée outrageusement nous dit-on par le port de la burqa !) dès lors qu’aujourd’hui le concept ne couvre qu’un minuscule coin de rue d’une immense communauté mondiale. Déjà Victor Hugo écrivait à Robert Pœhlen "l'idée de nation se dissout dans l'idée d'humanité".

Nous sommes aujourd’hui prés de 7 milliards d’êtres humains sur la terre dont 1 milliard environ d’africains. Leur nombre doublera en 2050 (soit 1 homme sur 4) et atteindra presqu’un homme sur 3 en 2100 malgré les épidémies et le Sida qui ravagent ce continent.

Que deviendra à cet horizon un concept aussi étriqué que celui des nations actuelles ? N’est-il pas temps, plutôt que de déblatérer sur quelques centaines de burqas - anachronisme sans importance sauf pour les victimes de cette coutume archaïque - d’élargir notre vision communautaire au moins à l’échelle du continent européen ?

Quant à la littérature, elle ne peut se résumer à son apparence. La ponctuation ne traduit pas toutes les nuances de l’intention de l’auteur. Comme l’usage veut que le blanc entre les mots soit unique, comme il n’existe pas de portée pour le texte comme pour les notes, comment entendre la mélopée voulue par l’auteur ? Pourtant la lecture comme la musique fait appel à l’intonation, au rythme mais aussi au silence si souvent ignoré. Pourquoi, alors que les contraintes techniques liées à l’invention de Gutenberg ont disparu, les textes n’utilise-t-on pas toutes les capacités qu’offre l’informatique pour nous faire découvrir le relief des écrits ?

Ces quelques exemples ne sont certes pas des certitudes, des évidences remplaçant d’autres évidences mais plutôt une tentative, que je concède partiale, partielle et imparfaite, de pied de nez goguenard au conformisme ambiant ; on brandit des préjugés comme des paravents à l’allure de valeur éternelle. Ils cachent trop souvent une absence de réflexion, un vide de pensée, un manque total d’imagination.


Patrice Leterrier

11 Septembre 2009

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