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Quand dans le début des années 2000, la croissance exponentielle des sites comme google ou Facebook a définitivement imposé le modèle économique de la gratuité sur internet, on pouvait penser que cette gratuité rimait avec une nouvelle ère de liberté, un accès généralisé à l’information sans la barrière de l’argent.
En réalité on fabriquait ainsi un mode façonné par des algorithmes. En refusant de payer nous avons vendu, non pas notre âme au diable, mais bien notre profil de consommateur à ces énormes citadelles qui filtrent pour nous l’accès que nous avons à la consommation y compris celle de l’information et la culture.
L’objectif étant de garder le maximum d’utilisateurs les génies du marketing algorithmique cherchent à cerner au plus près nos goûts, nos préférences pour nous proposer les produits qui correspondent le mieux à notre profil de consommateur.
Au fond ils nous installent dans un conformisme assez rassurant qui ne peut que conforter la pertinence de nos choix et nous installer dans une vision du monde en parfaite harmonie avec nos désirs.
La multiplicité des choix offerts nous donne l’illusion d’une grande liberté alors qu’elle n’est là que pour nous renforcer dans notre assurance de faire les bons choix.
Les amis qu’ils nous proposent sont en accord avec nos opinions, les produits qu’ils nous vantent correspondent à nos goûts et nous abandonnons la confrontation des opinions, la découverte d’une œuvre bousculant nos convictions et nos goûts avec ce droit dérisoire de cliquer « I like » puisque ce qui est important c’est de cerner nos goûts pour nous y vautrer sans complexe plutôt que de se confronter à l’autre pour s’enrichir de l’altérité.
Comme écrit sur le site themediashaker.com « Cela fait 10 ans que les industries culturelles et créatives sont en première ligne de la révolution digitale. Nouvelles plateformes de distribution (Google, Amazon, Apple…), nouveaux supports multimédias (écrans connectés, PC, tablettes, smartphones, consoles…), nouveaux services numériques (téléchargement, streaming…) : les contenus - films, musique, jeux vidéo ou livres – doivent être désormais disponibles tout le temps, partout et sans contrainte (“any time, anywhere, any device”). En permettant un accès immédiat et simultané à une variété infinie de contenus, la révolution numérique bouleverse dans le même temps l’écosystème des médias ».
Elle nous fait passer de l’époque où les opinions se confrontaient à travers des journaux d’opinions, les conversations du café du commerce, les débats entre amis à celle d’une information filtrée qui nous propose prioritairement ce qui nous ressemble le plus et par conséquent offre la plus grand probabilité que nous cliquions sur un choix proposé pour remplir les caisses de ces géants contrôleurs efficaces de notre navigation sur internet.
Au fond en acceptant de payer de nouveau comme par exemple sur le site du pureplayer Mediapart, nous reprenons le droit d’être confronter à des opinions qui n’ont pas été façonnées pour nous plaire.
L’apprentissage n’est pas dans la répétition des gestes et pensées que nous maîtrisons mais bien dans la confrontation à la nouveauté, au monde, aux autres, à l’expérience nouvelle.
Patrice Leterrier
28 Juillet 2015