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Une fenêtre ouverte sur le monde

Identité et communauté

minaret


S 

elon un sondage Ifop pour le journal Le monde, quatre français (et allemands) sur dix voient dans la présence d’une communauté musulmane une menace pour l’identité de leur pays.

Dans leur grande majorité (68 % pour les français et 75 % pour les allemands) ils pensent que les musulmans ne sont pas intégrés à la société et que la cause principale est un refus de leur part.

Thomas Legrand sur Slate.fr s’interroge sur le sens à donner au mot communauté musulmane soulignant la diversité qui représente en France et sur la signification de l’identité nationale.

Néanmoins retournant à la question posée, il affirme savoir ce que sont les valeurs républicaines, ce dont on peut lui faire crédit, et percevoir toute tentative de communautarisme comme un réel danger.

Les 809 français interrogés semblent facilement s’accorder - surtout à droite (62% chez les sympathisants UMP et jusqu’à 98% chez les partisans du FN) - pour définir ce qu’est une communauté musulmane et y voir un danger pour la république.

Peut-être parce que les débats sur le foulard, sur la burka ou les minarets ont cristallisés une inquiétude dans l’opinion ?

Il est certain aussi des manifestations comme les sifflets réservés à l’hymne national ou les prières organisées sur l’espace public ne peuvent qu’exaspérer et provoquer un reflexe de rejet.

Il est notable de noter que 9 français sur 10 se déclarent dans ce sondage hostiles au port du voile à l’école et que plus d’un sur deux juge l’influence de l’Islam trop importante en France.

On peut cependant au regard des débats qui agitent la société française s’interroger sur la congruence totale entre les valeurs républicaines et l’identité nationale.

La notion d’identité nationale semble relever d’un imaginaire assez flou, sorte de miroir aux alouettes où chacun peut mettre en creux ce qui le différencie de l’autre qui ne pourrait pas la revendiquer au nom d’un amalgame de valeurs associant des aspects historiques, culturels voire ethniques.

On peut également exprimer certaines interrogations lorsqu’on assimile la notion de communauté à celle de communautarisme pour en arriver à la conclusion qu’elle menace effectivement l’identité nationale.

On peut aussi se demander en quoi l’existence de communautés musulmanes s’opposerait objectivement aux valeurs républicaines alors même que l’on néglige la dimension communautarienne de la république française comme le l’écrit Sophie Heine sur le site raison-publique.fr : "le républicanisme […] requiert non seulement des engagements procéduraux sur la manière formelle de traiter les personnes avec un égal respect, mais aussi des « engagements substantifs » sur les « buts de la vie » et une identification forte avec la communauté" .

L’existence de communautés confessionnelles catholiques, protestantes, juives, ou musulmanes n’implique pas le communautarisme, revendiqué par certains comme la reconnaissance de droits particuliers de communautés.

Les communautés musulmanes sont d’ailleurs aujourd’hui beaucoup plus identifiables par des situations sociales inégalitaires.

L’assimilation de l’existence de ces communautés, aux contours d’ailleurs mal définis, souvent autant ethniques que religieuses, à UNE communauté musulmane ne traduit pas la réalité sociétale plus complexe que nous vivons.

Sophie Heine souligne qu’"attiser le nationalisme et la xénophobie peut donc être un moyen très efficace pour garantir le maintien de l’ordre social existant, car le mécontentement social des défavorisés se dirige contre les « étrangers » – faisant souvent partie des mêmes couches sociales que les premiers – et non contre les classes sociales dominantes".

Il ne s’agit pas de nier le danger potentiel que représentent des éléments extrémistes islamistes qui revendiquent clairement la disparition des valeurs de l’occident pour l’établissement d’un ordre religieux qu’ils accouplent singulièrement avec le mot République.

Il faut bien sûr combattre avec détermination et sans faiblesse ces activistes même s’ils sont largement minoritaires aujourd’hui.

On peut s’opposer avec conviction au communautarisme qui remet effectivement en question notre conception d’une république multiconfessionnelle et multiculturelle mais fondamentalement laïque.

Ce serait une erreur de jeter l’anathème sur des citoyens français qui se réclament de confession islamique, pour la majorité non pratiquants, constituant des communautés bigarrées qui ne revendiquent généralement que la liberté de penser et de croire inscrite dans la constitution (préambule et article X de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen).

La France n’a rien à perdre à reconnaître les droits culturels individuels dans sa dimension identitaire et c’est même sa grandeur de savoir les accueillir pour enrichir la diversité nationale.

Il est d’ailleurs rassurant de constater qu’ils ne sont plus qu’un jeune sur trois de moins de 28 ans à avoir peur de l’Islam.


Patrice Leterrier

7 Janvier 2011 

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