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Une fenêtre ouverte sur le monde

Du marégraphe au Mont Blanc

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D

epuis que la corniche a été complètement percée en 1863, reliant le quartier d’Endoume à la plage du Prado, la vie Marseillaise s’est organisée dans une communication subtile entre une zone de villégiature et de loisir longeant la Corniche et une zone laborieuse représentée par le port et ses extensions vers l’estaque, vestiges de la gloire aujourd’hui passée de ce grand Port.     

En quittant le quartier d’Endoume par le pont de la fausse monnaie, vous débouchez aujourd’hui sur la partie de la corniche élargie à la fin des années 50 sous l’impulsion de Gaston Deferre, alors indéboulonnable maire de Marseille.

La vue est magnifique sur l’immense rade et rien ne vient troubler sa contemplation, pas même ce petit édifice bizarrement flanqué à droite en face de l’entrée du Parc Valmer qui porte le nom étrange d’"Observatoire marégraphique muni d’un marégraphe totalisateur", plus connu des marseillais sous le nom de marégraphe.

Pour peu qu’on prête un peu d’attention à cette dénomination, on en vient à se demander quelle mouche avait piqué les membres du Comité du nivellement Général de la France de venir mesurer l’amplitude des marées dans ce recoin de la méditerranée à l’anse Calvo, alors même que chacun sait que Mare nostrum reste somme toute assez indifférente à la tentative de séduction que fait la lune pour l’attirer.

Les instances européennes avaient décidé en 1864 que, dans un souci de fiabilité, le calcul des altitudes se ferait désormais  à partir d'un point zéro clairement établi dans chaque pays.

La faiblesse des amplitudes de marée (8 à 10 cm) et la rareté des tempêtes dans cette zone permettait de faire sur une longue durée une moyenne ou plutôt une courbe de tendance qui donnait une altitude zéro d’une grande fiabilité et justifiait ce choix bien étrange pour une administration centralisée.

Les travaux pour la construction du marégraphe furent supervisés par l’ingénieur Charles Lallemand, secrétaire du Comité du Nivellement.

Les mesures durèrent du 1er février 1885 jusqu’à fin 1896. Elles débouchèrent sur la mise en place d’un repère à base d’iridium et de platine qui est toujours LE repère fondamental du nivellement général de la France implanté à 1,66 mètre par rapport au niveau zéro.

Il succédait au zéro de nivellement, fixé arbitrairement par une décision ministérielle du 13 janvier 1860 et  matérialisé par le trait de 0,40 m de l'échelle de marée du fort Saint-Jean à Marseille.

A partir du repère fondamental du marégraphe de Marseille, 500 000 repères ont été implanté en France connu sous le nom de réseau Lallemand.

Le réseau IGN de France continue d’utiliser le repère marseillais même si le repère fondamental a été augmente d’un dixième de millimètre à 1,661 mètre (passage d’une altitude dite orthométrique à une altitude dite normale).

Depuis le début des mesures, soit plus d’un siècle, le niveau de la mer monte d’un millimètre par an ce qui fait un peu plus de onze centimètres de nos jours.

Bien que les mesures soient aujourd’hui prises par un marégraphe  numérique, le marégraphe d’origine, fruit d’un long échange de vues entre l’ingénieur civil hambourgeois F.H.  Reitz et Charles Lallemand, fonctionne toujours.

Il enregistrait sur deux bandes de papier recouvert d’une très fine couche de vernis à l’encre de Chine les variations du niveau de la mer mesurées par un flotteur.

Ainsi sans être le centre du monde, comme la gare de Perpignan selon Salvador Dali, le marégraphe de la corniche à Marseille reste le repère de toutes les altitudes en France et lorsqu’on dit par exemple que le Mont Blanc se trouve à 4807 mètres d’altitude on devrait préciser plus exactement par rapport au point zéro  du marégraphe de la Corniche à Marseille.


Patrice Leterrier

18 décembre 2013

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