Une fenêtre ouverte sur le monde
Il n’y a pas d’alternative…
Carl Von Clausewitz
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var Ekeland, professeur d’économie mathématique, écrit dans la revue Pour la Sciences de Janvier 2009 qu’à la question récurrente qui lui est posée "Que doit-on faire pour se sortir de la crise?", il répond invariablement "Mais qui veux-tu qui s’en sorte?". Il cite Carl Von Clausewitz théoricien militaire prussien du 19ème siècle: "La guerre" qu’Ivar Ekeland propose de remplacer par l’économie "n'est rien d'autre que la continuation de la politique par d'autres moyens". Pas plus que les militaires n’ont la mission de désigner les ennemis, les économistes ne sont pas en charge de décider si la sauvegarde de l’environ-nement, la fin de la famine dans le monde, les pandémies africaines, le sauvetage des banques, les investissements productifs, le pouvoir d’achat doivent être les priorités à privilégier dans l’optimisation de l’éco-nomie. Le drame c’est que la plupart du temps les hommes politiques présentent leurs actions comme étant la seule chose à faire face à la situation, comme s’il n’y avait pas d’alternative selon l’expression chère à Margareth Thatcher. Ils se gardent bien de nous dévoiler leurs choix. Ils feignent d’ignorer qu’ils sont en concurrence avec d’autres possibilités. On peut ajouter à ce manque de clarté, qui fait pourtant le fondement et la noblesse de l’action politique, la lâcheté généralisée des commentateurs. On entend aussi ici et là de sentencieux spécialistes autoproclamés. Ils découvrent effarés que le monde de la finance ne peut se soustraire aux réalités par des tours de passe passe plus ou moins sophistiqués qu’ils encensaient de leur commentaires admiratifs il y a si peu de temps. Ils proclament, avec un sérieux dans le ton à la hauteur de leur incompétence pédante, qu’il faut en finir avec les mathématiques dans le monde de la finance. Ils se trompent évidemment de cible confondant l’outil et l’objectif. Ils ont surtout, par fatuité imbécile, oublié le principe de base qui est que l’on ne peut donner sérieusement d’avis sur ce que l’on ne comprend pas! Vous me direz si on devait suivre ce principe, le monde plongerait soudain dans un silence surement réparateur de la folie humaine mais peut-être aussi un peu angoissant tant on est habitué à être entouré de spécialistes de tout acabit qui pensent et pérorent à notre place. Et voila donc le pot aux roses découvert à l’occasion de cette crise! Le monde de la finance s’est caché derrière une complexification galopante soutenue par des modèles mathématiques de plus en plus sophistiqués en oubliant le bon sens et la finalité de leurs actions. Au point d’en arriver à une incroyable absurdité comme celle de l’affaire de la faillite frauduleuse de Bernard Madoff. Tout le monde prend des airs consternés. On cite l’honorabilité apparente de ce monsieur encensé par tous. On oublie tout simplement une évidence pourtant criante: celle de l’impossibilité des rendements annoncés. Il est probablement plus utile que jamais d’avoir recours à la connaissance scientifique dans la gestion des risques. Il faut arrêter d’accuser le couteau d’être l’auteur de la blessure. Le maladroit ce n’est pas la lame mais bien celui qui la tient! Il est aussi important que les choix qui sont faits soient clairement expliqués par les politiques de tout bord au lieu de nous les assener comme une évidence. Le pire résultat de cette situation ubuesque est la perte totale de confiance. Elle mine inexorablement maintenant tous les esprits et discrédite la politique alors qu’elle est au cœur des choix que nous avons à faire face à cette crise.
19 décembre 2008