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19 juin 2009 5 19 /06 /juin /2009 17:23


L

a dépêche tombe laconique dans toute son horreur : L'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) annonce aujourd’hui que "La crise silencieuse de la faim - qui touche un sixième de l'humanité - représente une grave menace pour la paix et la sécurité mondiales".

La quasi-totalité des personnes sous-alimentées de la planète vivent dans les pays en développement : 642 millions de personnes en Asie et le Pacifique ; 265 millions en Afrique subsaharienne ; 53 millions en Amérique latine et les Caraïbes ; 42 millions au Proche-Orient et en Afrique du Nord ; et 15 millions au total dans les pays développés(1).

Jacques Diouf, Directeur général de la FAO, à l'occasion de la publication de ces nouvelles estimations, a déclaré "Nous devons de toute urgence dégager un large consensus sur l'éradication totale et rapide de la faim dans le monde et prendre les mesures nécessaires à cet effet".

En 2009, "le nombre des victimes de la faim devrait augmenter globalement d'environ 11 %", selon des projections s'appuyant sur une étude du Service de recherches économiques du département américain de l'Agriculture.

"Le ralentissement de l'économie mondiale et la flambée persistante des prix des denrées alimentaires dans de nombreux pays a fait sombrer dans la faim et la pauvreté quelque 100 millions de personnes de plus par rapport à l'an dernier", résume Jacques Diouf, directeur général de la FAO.

De son coté Josette Sheeran, Directeur exécutif du Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM), déclare "la progression rapide de la faim provoque une gigantesque crise humanitaire. Le monde doit se ressaisir pour satisfaire les besoins d'urgence tout en pensant à des solutions à long terme […] Il existe un risque sérieux d'aggravation de la faim chronique et de recul en ce qui concerne les progrès durement acquis ces dernières années".

Une étude menée par son organisation en Arménie, au Bangladesh, au Ghana, au Nicaragua et en Zambie montre que la crise économique mondiale touche durement les familles dont les membres vivent avec 2 dollars par jour et qu'elles commencent à souffrir de la faim, indique jeudi le Programme alimentaire mondial.

Elle déclare "dans chacun de ces cinq pays, les projections sont alarmantes pour ce qui est de dizaines d'autres pays du monde en développement. Elles montrent que pour ceux qui vivent avec 2 dollars par jour la faim va s'accélérant et le pire est à venir "

La majorité des ménages réduisent le nombre de repas par jour ou servent des repas plus économiques mais moins nutritifs. Certaines familles dépensent moins pour la santé ou retirent leurs enfants de l'école.

Les prix de la nourriture et des carburants restent trop élevés et la crise a fait que de nombreux expatriés ne peuvent plus envoyer assez d'argent au pays pour nourrir leur famille.

Que sont devenus les objectifs du millénaire (*) pris en 1990 par la communauté internationale de diviser par deux le nombre de personnes souffrant de malnutrition d’ici 2015 ?

La maison est totalement en flammes pour reprendre l’expression de Jacques Chirac à Johannesburg et nous regardons je ne sais où…


Patrice Leterrier

19 juin 2009

(*) Goal 1 Target 2 : Halve, between 1990 and 2015, the proportion of people who suffer from hunger.

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19 juin 2009 5 19 /06 /juin /2009 13:11


L

es candidats au Bac de série L pouvaient choisir de traiter le sujet suivant : "L'objectivité de l'histoire suppose-t-elle l'impartialité de l’historien ?"

Jean-Jacques Rousseau disait dans l’Emile : "Thucydide est, à mon gré, le vrai modèle des historiens. Il rapporte les faits sans les juger ; mais il n'omet aucune des circonstances propres à nous en faire juger nous-mêmes." Voilà donc les qualités requises pour faire un bon historien selon lui.

Pour autant suffisent-elles à donner du sens à l’histoire, à faire de l’histoire celle des hommes et pas une succession de faits chronologiques dans des circonstances dont on peut d’ailleurs douter de l’exhaustivité n’en déplaise à Rousseau.

L’histoire a fait l’objet de tellement de détournements, de mensonges, de parti-pris en vue de démontrer des théories sur son supposé sens, qu’il est bien difficile de parler de l’objectivité et de l’impartialité de l’historien.

Pourtant, nous attendons légitimement que l’histoire nous soit rapportée avec objectivité, c'est-à-dire qu’elle soit mise en ordre méthodologiquement pour être comprise et pas simplement une succession de faits rapportés sans lien entre eux autre que la chronologie.

Evidemment en première analyse, il y a clairement des historiens qui manquent d’objectivité et qui sont de parti-pris comme il y a aussi beaucoup d’homme politiques, d’ecclésiastiques, de journalistes et de citoyens qui ont la même attitude.

Mais peut-on pour autant parler d’objectivité et d’impartialité pour les autres ?

L’impartialité évoquée ne se réduirait pas tout simplement au silence s’il s’agissait de n’exprimer aucun part pris alors qu’il faut bien se décider à en prendre un pour reporter des faits même si on appelle cela un point de vue.

Que dire de l’objectivité de l’historien sinon que le mot objectivité est lui-même d’une grande ambiguïté.

Veut-on dire, comme le suggère le Petit Larousse, pour objectivité que l’historien doit faire abstraction de ses préférences ?

Mais ses préférences ne l’ont-elles pas guidé dans ses recherches, dans ses choix, dans son approche de faits rapportés déjà souvent par d’autres qui avaient leurs propres subjectivités sans pour autant que l’historien soit obligé de les partager ?

A moins qu’on imagine que l’objectivité suppose la connaissance complète et parfaite des faits et de leurs circonstances, ce qui est impossible même de nos jours où les moyens d’informations se multiplient comme on peut le voir dans la guerre médiatique qui se joue en Iran.

Et quand bien même les faits serait connus, que dire des intentions des acteurs de l’histoire qui n’avaient rien d’objectif, que dire du contexte, des circonstances ?

Au fond ce qui compte c’est que l’historien soit méthodique, rigoureux et cohérent dans son approche, en quelque sorte qu’il soit honnête dans sa subjectivité, qu’il l’exprime clairement et sans ambages.

A l’occasion il n’est pas déplaisant qu’il écrive bien et qu’on ait donc plaisir à le lire…

L’historien raconte toujours une histoire, pas l’histoire qui est un concept abstrait comme d’ailleurs la vérité, l’objectivité ou l’impartialité.

Mais ces concepts n’existent-ils pas que par leurs négations? Elles sont parfaitement identifiables comme le mensonge, la mauvaise foi et le parti-pris. On peut vraiment dire, par exemple, qu’un négationniste ment de mauvaise foi et de parti-pris et ne fait pas œuvre d’historien.

Et puis l’histoire est soumise aussi à notre propre subjectivité, à notre méditation à sa lecture qui lui donne le sens que l’on construit soi-même au-delà de la subjectivité objective de l’auteur.

Quant au sens de l’histoire, Bergson disait "les signes avant-coureurs ne sont donc à nos yeux des signes que parce que nous connaissons maintenant la course, parce que la course a été effectuée". Et puis vu l’usage fait par des générations de donneurs de leçons qui ont conduit à des gigantesques catastrophes, il est clair que celui qu’on lui attribue trahit à coup sûr l’intention de l’auteur.


Patrice Leterrier

19 juin 2009

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18 juin 2009 4 18 /06 /juin /2009 12:42


D

ix ans ont été requis à l’encontre de Véronique Courjault par Philippe Varin, l’avocat général, devant la cour d'assises d'Indre-et-Loire au nom du droit et pour des faits "d'une exceptionnelle gravité".

Dix ans pourquoi ? Pour comprendre ? Pour regretter ? Pour se reconstruire ?

Comment comprendre l’indicible, comment regretter l’inoubliable, l’inimaginable, l’insupportable.

Comment serait-il possible de se reconstruire en Prison, dans un monde ou l'infanticide est considéré comme le pire des crimes ?

Dix ans peut-être simplement pour satisfaire le désir d’en finir avec l’insoutenable image de l’infanticide.

Pour ne pas se poser la question du pourquoi et du comment un être, certes fragile mais qui n’a rien d’un tueur en série ni d’une diablesse, a commis par trois fois des actes horribles, insoutenables, irréparables.

La science a déjà démontré de manière irréfutable combien notre conscience pouvait être inhibée, masquée par nos émotions. Combien des événements que nous avons vécus peuvent être déformés sans que nous en ayons conscience ou combien des images que nos yeux voient se trouvent masquer à notre conscience ou encore le trouble des illusions dont nous pouvons être victimes.

Il suffit pour s’en convaincre de suivre les cours de Pascal Dehaene, Professeur au Collège de France et titulaire de la chaire de Psychologie Cognitive Expérimentale.

Ces travaux, certes partiels, démontrent à ceux qui en douteraient encore combien nos connaissances sur les mécanismes du cerveau sont encore infimes par rapport à l’immense iceberg qui se cache sous la surface du conscient.

Alors pourquoi un magistrat repousse-t-il avec mépris les dimensions cachées de l’esprit humain pour s’en tenir à ce qu’il appelle "le premier degré" ?

Quelle impudente certitude basée sur l’ignorance ou pire les préjugés qui faisaient autrefois bruler les sorcières !

Philippe Varin est donc, imperturbable dans sa raideur intellectuelle, dans le droit fil des juges de l’inquisition qui condamnèrent Galilée parce qu’il remettait en cause les certitudes reconnues par le pouvoir religieux et qui donc ne souffraient aucune contestation.

Il nous dit que Véronique Courjault a bel et bien eu conscience d'être enceinte par trois fois avant de tuer consciemment ceux qui, pour lui, étaient des "bébés".

Fort bien ! Le fait est donc établi par ce pragmatique borné qui raille Freud et Lacan.

Au nom de cette certitude, il escamote le débat sur ce douloureux dossier du déni de grossesse pour choisir une autre forme de déni, celui de justice.

On raille les experts pour leurs hésitations, leurs contradictions, on se souvient du poids insupportable que la justice a essayé de leur faire porter dans l’Affaire d’Outreau. On exorcise ainsi notre profonde gêne devant l’insondable esprit humain.

Dans dix ans (ou avant) une femme vieillie, brisée, démolie probablement à jamais sortira peut-être de prison. N’a-t-elle pas déjà assez de l’insupportable réalité de ses actes comme poids bien lourd à porter ?

L’exemplarité me rétorquera-t-on !

Allons donc ! Soyons sérieux ! Qu’est ce que la peur de la justice a à voir avec ces crimes inexplicables qui nous ramènent à l’immense méconnaissance que nous avons de l’esprit humain et de ses méandres ?

Dix ans pour que la pestiférée ne puisse pas contaminer les femmes ? Quelle absurdité et quelle pitié que cette justice bornée et archaïque.


Patrice Leterrier

18 juin 2009

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17 juin 2009 3 17 /06 /juin /2009 18:43

Iran blogosphère

S

ur son blog, Francis Pisani, pose la question de savoir si les personnes avec qui nous échangeons à travers les blogs, les sites dits sociaux comme Facebooks et autres sont des communautés ou des réseaux ?

On peut bien sûr revenir à la définition que donne le petit Larousse des deux mots.

Mais les choses ne se clarifient pas pour autant car ce dictionnaire nous propose en effet pour réseau bien des définitions assez différentes !

Il parle d’ensemble de personnes qui sont en liaison, qui travaillent ensemble (ex. un réseau d'amis) ou encore d’organisation clandestine (réseau d'espionnage, de résistance), ou même de structure définie par des relations entre des individus voire groupe social ayant des caractères, des intérêts communs, d’ensemble des habitants d'un même lieu, d'un même État.

Voilà presque la définition parfaite du fourre-tout et il est incontestable que trop de sens tue le sens…

On n’est pas vraiment mieux loti avec le mot communauté ! Toujours selon le pavillon de Sèvres de l’orthographe et du Scrabble, il peut signifier un groupement de communes, un établissement public regroupant plusieurs communes ou plus largement un ensemble de pays unis par des liens économiques, politiques, etc (vous admirerez l’et cetera…). On trouve encore, dans cette inépuisable source de connaissance, un groupe de personnes vivant ensemble et poursuivant des buts communs, une société de religieux soumis à une règle commune pour finir en apothéose par la définition biocénose en écologie. Le même petit Larousse, source inépuisable pour ma curiosité maladive, m’apprend (je confesse donc que je l’ignorais) que le mot biocénose désigne l’ensemble des êtres vivants (animaux, végétaux, micro-organismes) présents dans un même milieu ou biotope. A vrai dire cette précision ne constitue pas une clarification sur le sens du mot communauté dont on ne peut pas dire que le sens commun s’impose à l’évidence à la communauté linguistique…

Donc après cette courte et très infructueuse recherche en vue d’un éclairage sur la question posée, j’ai envie de citer la maxime d’Albert Einstein :"Si vous ne pouvez expliquer un concept à un enfant de six ans, c'est que vous ne le comprenez pas complètement".
Il y aurait bien aussi du même auteur "Un problème sans solution est un problème mal posé" ou sa variante plus humaniste par André Gide "Il n'y a pas de problème ; il n'y a que des solutions. L'esprit de l'homme invente ensuite le problème".
Et au fond la sage sentence d’André Gide n’est-elle pas la clef de la question posée ?
Ces relations lâches, temporaires voire furtives, ténues et même superficielles que nous entretenons sur internet grâce à l’ordinateur (qu’il soit au grand jour sur un portable, un poste fixe ou enfoui dans un "Smartphone" qui cache sa vraie nature) n’ont en fait rien à voir du point de vue sémantique ni avec un réseau ni avec une communauté, quelle que soit la définition qu’on choisisse pour ces mots.
Il serait plutôt question d’une vague "connectauté" qui ne se définirait guère que par sa connectique. Elle ne se caractérise en tout cas pas par le partage stable d’objectifs, d’intérêts, de goûts littéraires, musicaux, artistiques… ou même par l’appartenance a des ensembles géographiques, linguistiques ou ethniques.
Ce qui n’interdit pas bien sûr à de vraies communautés et/ou réseaux d’utiliser largement ces mêmes moyens pour communiquer !
Mais ce n’est pas l’outil qui fait la communauté ou le réseau même si l’outil est un fantastique moyen pour faire vivre ces entités comme par exemple sur la blogosphère iranienne malgré la censure d’un pouvoir aux abois.
On ne dira jamais assez combien ces fantastiques outils permettent aux idées de circuler comme jamais elles n’ont circulé !


Patrice Leterrier

17 juin 2009

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16 juin 2009 2 16 /06 /juin /2009 13:15


L

es irrégularités qui entachent les résultats de l’élection présidentielle iranienne ont amené des foules considérables à manifester dans les rues de Téhéran et d’autres grandes villes de ce pays. Le slogan en vogue dans ces manifestations est "Where is my vote  ?".

Thierry Coville, chercheur associé à l'Iris, nous rappelle que la candidature de Mir Hossein Moussavi n’était que le "plan B" du Guide Suprême, Ali Khamenei qui soutenait indirectement, mais très clairement, la candidature de Mahmoud Ahmadinejad. Il ne faut pas oublier que le président iranien n’est même pas le chef des armées, ce rôle étant dévolu au guide suprême qui peut démettre le président.

Et donc, même si l’élection de Mir Hossein Moussavi qui servait d’alibi démocratique aux mollahs, n’aurait rien changé fondamentalement à la ligne politique de l’Iran sur le plan international et notamment sa position sur l’épineux dossier du nucléaire, elle aurait été tout de même un signe d’ouverture et un espoir pour les iraniens d’un possible desserrement de l’étau que le régime fait subir à sa population.

Seul un renversement du régime théocratique qui règne en réalité sous des mascarades pseudo démocratiques depuis 30 ans en Iran pourrait apporter un véritable déblocage politique de la situation et un espoir de réintégration de l’Iran dans le concert des nations.

Au passage un tel événement, tout à fait improbable aujourd’hui compte tenu de la main de fer qu’impose le régime sur sa population (rappelons qu’il y a eu 30 exécutions capitales en Iran l’année dernière), serait une bien mauvaise nouvelle pour le régime d’extrême droite actuellement au pouvoir en Israël qui use et abuse de la menace iranienne pour justifier son intransigeance vis-à-vis des palestiniens.

Aujourd’hui le régime iranien, dont le bilan économique est catastrophique, est largement discrédité auprès d’une jeunesse instruite et ouverte sur le monde qui représente la majorité de la population iranienne (prés de la moitié des iraniens ont moins de 25 ans et 60% des étudiants iraniens sont des étudiantes…) et qui n’a jamais connu d’autre régime que la pseudo démocratie aux mains des ayatollahs.

Thierry Coville insiste sur le fait que "les Iraniens sont à 70% urbains. La modernisation de la société concerne l'ensemble du pays, pas uniquement les grandes villes".

Comme l’explique par ailleurs, Julien Pain, responsable du site participatif des observateurs sur France 24, "L'Iran a des infrastructures de qualité, ainsi que des fournisseurs d'accès privés. La population a un bon niveau d'éducation".

Peut-être se souvient-on du rôle joué en 1979 par la radio, la télévision et les hauts parleurs des mosquées dans le mouvement populaire qui renversa le shah pour établir le régime des Mollahs ?

A l’instar du rôle joué par la radio et la télévision il y a 30 ans, ce qui se passe actuellement en Iran est probablement la première manifestation du rôle considérable que peuvent jouer internet et le téléphone portable comme supports d’un mouvement de protestation populaire massif.

La blogosphère iranienne, que le pouvoir en place cherche à bloquer en fermant l’accès aux sites réformateurs, est la troisième au monde et ne compte pas moins de 700 000 sites dont 100 000 sont actifs. Selon internet sans frontières "Iranian blogs are the true voice of the next generation".

Julien Pain souligne à ce sujet que "l'Iran est un des pays les plus connectés dans la région. Il y a près de 21 millions d'internautes pour 72 millions d'habitants". La première plateforme de blogs du pays, Blogfa, compte deux millions d'inscrits.

Internet ratisse donc plus large que ce que l'on pourrait penser et malgré ses efforts constants, le pouvoir en place a des difficultés immenses à museler une opinion d’autant que l’usage de twitter complique énormément la tâche des censeurs, même s’il est exagéré comme le titre Libération de parler de révolution twitter.

Nul ne peut prédire si cette crise aboutira à de nouvelles élections, à un changement de régime improbable ou sera étouffé dans le sang des manifestants qui a déjà coulé.

Ce qui est sûr c’est que tous les dictateurs du monde devront à l’avenir compter avec la puissance de la toile qui rend bien difficile la mystification des populations dans des pays où l’infrastructure des télécoms ouvre les vannes à une information sans filtre.

Les chinois ne s’y sont pas trompés en fermant des sites à la veille de la commémoration des événements de Tienanmen !

Patrice Leterrier

16 juin 2009

 

 

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15 juin 2009 1 15 /06 /juin /2009 17:57

 

L

e nom Iran vient d’Aryanam-vaejo, le pays des Aryens.

Au passage, quel incroyable clin d’œil de l’histoire que cette référence aux ariens pour un pays dont le président Mahmoud Ahmadinejad, qui aime à citer Goebbels, est le seul dirigeant d’un pays membre de l’ONU qui soit à la fois négationniste et appelle à la destruction d’un autre membre de l’ONU, l’état d’Israël.

Sa réélection fait l’objet aujourd’hui de nombreuses interrogations y compris en Iran puisque le guide suprême, l'ayatollah Khamenei, exige que le Conseil des gardiens de la Constitution examine les accusations de fraude lancées par Mir Hossein Moussavi.

Ahmadinejad est fidèle à son image quand il déclare que les élections en Iran sont "les plus propres" du monde par rapport à celles des "démocraties libérales" qui "inclus les voleurs, les homosexuels et autre personnes impures dans l'électorat pour gagner des voix".

Mais au fond cette réélection est d’abord une affaire interne à ce pays.

Il faut éviter de calquer notre schéma européen voire franco-français pour comprendre les institutions de la république théocratique islamique.

À la tête du pays se trouve le "Guide Suprême", autorité religieuse dominante et véritable maître du pays. Sous sa responsabilité, le pouvoir exécutif est détenu par le président de la république, chef du gouvernement, qui dispose d'un cabinet composé de 20 ministres. Le pouvoir législatif appartient à un parlement supervisé par un "Conseil des Gardiens de la Constitution" qui approuve ou s'oppose aux résolutions de l'assemblée et qui peut aussi opposer son véto à toute candidature aux élections.

Il est donc clair dans ce pays "semi-démocratique" que le président n'a qu'une influence limitée. Mais il est clair aussi que sous le mandat de Mohammed Ahmadinejad, le régime s’est radicalisé sans doute avec l’assentiment pour ne pas dire la main occulte du "guide suprême". Outre les multiples déclarations antisémites, anti-Israël, et provocatrices, il y a cette volonté affichée de créer un front islamique chiite avec le Hamas, qui tient le pouvoir dans la bande de Gaza, et le Hezbollah, mouvement chiite surtout présent au Liban et en Syrie, front qui proclame ouvertement son objectif de détruire Israël.

Ensuite, on ne peut pas comprendre ce pays, qui depuis Cyrus le Grand, s’est toujours appelé l’Iran et non la Perse(*), sans revenir un instant sur son histoire.

"Quand on a dompté le conquérant grec, triomphé des armées romaines, assimilé la puissance arabe, survécu aux Mongols, contenu l’Empire ottoman, puis les hordes afghanes et indiennes... et desserré l’étreinte de l’Armée rouge, que peut-on craindre de l’avenir ? " se demandait le dernier Shah Mohammad Réza Pahlavi, initiateur du programme nucléaire iranien.

La question posée par l’ancien souverain donne une assez bonne image de ce qu’est la fierté des iraniens mais aussi de leur véritable obsession de sanctuariser leur territoire.

L’élection de l’adversaire malheureux d’Ahmadinejad n’aurait pas changé grand-chose sur le sujet du nucléaire qui agite toutes les chancelleries occidentales et qui est dans les mains du guide suprême.

Personne de sérieux ne doute que ce pays a pour objectif ultime de se doter de l’arme nucléaire. La politique nucléaire de ce pays, qui d’ailleurs avait démarré sous le règne du Shah, répond au souci constant de ce pays pour sa sécurité face à la menace de l’arme nucléaire israélienne.

Il est d’ailleurs assez cocasse de se souvenir qu’en 1977 les États-Unis décidèrent d’en finir avec le Shah car il craignait que l’Iran ne devienne une puissance nucléaire… comme le rappelle Houchang Nahavandi, ancien ministre du Shah.

Au fond on pourrait presque dire de façon paradoxale que les rodomontades et les provocations du président Ahmadinejad donnent plus de raisons aux israéliens et aux occidentaux de s’inquiéter d’un programme qui autrement relèverait de la même logique que l’arme nucléaire israélienne avec ni plus ni moins de justifications.

Si ce n’était que l’Iran reste la clé géographique du Moyen-Orient et que ce qu’il y a de plus inquiétant dans la politique iranienne, ce n'est pas son désir plus au moins légitime de posséder des armes atomiques, mais plutôt sa campagne pour l'hégémonie régionale sous bannière religieuse et la destruction d’Israël, enhardie par son développement nucléaire.   


Patrice Leterrier

15 juin 2009

(*) La Perse est en fait une des provinces de l’Iran.

Voir aussi :

L'iran et sa stratégie sur canal U

Un témoin de la revoltion iranienne : Houchanf Nahavandi sur Canal Académie

 

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13 juin 2009 6 13 /06 /juin /2009 20:23
Image du WWW


L
e 12 Novembre 1990, l’anglais Tim Berners-Lee et le belge Robert Cailliau remettaient leur "WorldWideWeb: Proposal for a HyperText Project".
Le projet fut jugé par leur supérieur, Mike Sendall, "Vague, but exciting" et il donna son feu vert. Le Web était né.
Le Web ne se voulait à l’origine qu’une application de plus, comme les messageries, de l’internet dont les principes furent mis en place pour la première fois à la fin des années 1960 avec le projet ARPAnet du Département de la Défense des Etats-Unis.
Depuis le véritable démarrage du World Wild Web au milieu des années 1990, le nombre de pages mises en ligne a explosé, atteignant 15 milliards et touchant à presque tous les aspects de la vie moderne.
Il ne s’est pas contenté d’être un nouveau vecteur pour des communautés d’intérêts scientifiques (Tim Berners-Lee était informaticien au CERN, Centre Européen de Recherche Nucléaire) ce qui était le projet à l’origine de sa création.
Il a véritablement modifié en profondeur la médiation entre les usagers et les banques, la presse et plus généralement les médias, les organismes gouvernementaux, les mutuelles…
Il a généralisé la messagerie instantanée.
Il a permis l’explosion des moteurs de recherche comme google.
Il a donné naissance à des réseaux sociaux comme Facebook.
Il a probablement définitivement bouleversé le mode de diffusion de la musique et des films même si des combats d’arrière garde se cachent derrière le sacro-saint alibi des droits d’auteur pour défendre les intérêts des majors de la distribution.
Il a enfin permis la création de la blogosphère qui multiplie exponentiellement la possibilité de d’exprimer sur la toile et d’être lu par un plus grand nombre.
On pourrait probablement multiplier presqu’à l’infini les profonds changements que cet outil a apporté dans la communication et la diffusion du savoir littéraire, scientifique et artistique mais aussi dans les comportements des utilisateurs.
Devant l’ampleur incroyable du phénomène, Nigel Shadbolt (professeur à l’université de Southampton en Angleterre) et Tim Berners-Lee (le co-inventeur du World Wide Web) publient dans le numéro 379 daté de Mai 2009 de la revue Pour la Science un article intitulé "l’émergence de la science du web".
De quoi s’agit-il ? Les auteurs partent du constat que la croissance du Web crée des propriétés émergentes nouvelles comme les réseaux sociaux ou les mondes dit virtuels peuplés d’avatars mais aussi des problèmes comme celui des usurpations d’identité.
La science du Web vise à découvrir ces propriétés et à résoudre les problèmes que posent le web comme le respect de la vie privée, la sécurité des personnes, le degré de fiabilité des contenus ou encore l’épineuse question de la propriété intellectuelle et des droits d’auteurs.
Mais au-delà de ces questions de droit, d’éthique et de sécurité, la Web pose aussi un véritable problème de société.
On pense bien sûr aux pathologiques de l’internet comme la cyberdépendance.
Il y a aussi le problème soulevé par Laurent Bègue, professeur de psychologie à l’Université de Grenoble, du cyber harcèlement qui sévit sur internet (et aussi sur les téléphones portables avec les SMS et les MMS) avec les messages agressifs, les vidéos indiscrètes ou pire humiliantes, les usurpations d’identité, etc…
L’auteur rapporte que plusieurs adolescents se sont suicidés après avoir été harcelés par le biais d’internet ou de leur téléphone portable.
Que dire de l’imbrication entre le monde virtuel et le monde réel qui peut aller jusqu’à confusion des identités par la dématérialisation des interlocuteurs comme avec les jeux en ligne tel que Second Life ?
Récemment une britannique a demandé le divorce arguant des infidélités virtuelles de son mari sur Second Life.
Il n’est probablement pas inutile que les experts se penchent sur la "science du Web" mais il est tout aussi urgent et important que la société prenne en compte les dangers et les pathologies liés au web qui n’ont, elles, rien de virtuelles !


Patrice Leterrier

11 juin 2009

(*) : warning : alarme
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12 juin 2009 5 12 /06 /juin /2009 17:53
 

C

'est donc pour la Saint Augustin, le lundi 15 juin que sortira le nouveau Petit Larousse 2010.

Tout le gotha guette qui aura l’honneur de rentrer dans ce dictionnaire prestigieux qui fête cette année ses 120 ans.  

Les arbitres des nominations n’y sont pas allés de main morte en faisant rentrer 150 nouveaux mots, sens expressions et locutions et pas moins de 50 personnalités politiques, culturelles, scientifiques et sportives ainsi que sept nouvelles planches illustrées.

Cela ne résoudra pas les misères du parti socialiste d’apprendre que leur première secrétaire Martine Aubry entre dans cette version en compagnie d’abord bien sûr de Barack Hussein Obama mais aussi de sa rivale malheureuse Hillary Clinton, du ministre de la Défense Hervé Morin et du président du Sénat, Gérard Larcher. Elle y retrouve aussi les écrivains Annie Ernaux et Benoîte Groult, les comédiens Jean Rochefort, Fanny Ardant, Sandrine Bonnaire, Audrey Tautou, les chanteurs Jane Birkin et Francis Cabrel, le grand buveur de café George Clooney et bien d’autres encore.

Pour les nouveaux mots on trouvera un clin d’œil adressé à la "vertitude"(*) ambiante avec l’entrée du mot "décroissance" défini comme une "politique préconisant un ralentissement du taux de croissance dans une perspective de développement durable". Il accompagne l’assez horrible mot financiarisation, le pur anglicisme "burn-out" qui ne s’imposait pas face à surmenage, pas plus que les qualificatifs surbooké ou overbooké.

Coté nouvelle technologie on trouvera le curieux mobinaute (mariage de "mobile" et d'"internaute") qui se veut désigner une "personne qui navigue sur Internet à partir d’un appareil mobile". Que direde peer-to-peer (P2P pour les initiés) qui avait fait l’objet depuis le 13 mai 2006 de la traduction officielle pair-à-pair ou poste-à-poste ?

Le Larousse argue qu’il consacre l’usage et le définit comme "une technologie permettant l’échange direct de données entre ordinateurs reliés à Internet sans passer par un serveur central". il est vrai que le P2P est à la mode avec le feuilleton de la loi Hadopi.

On trouve aussi buzz officiellement introduit au journal officiel du 12 juin 2007 avec le sens de bouche à oreille ou de bouche à oreille électronique. Le petit Larousse le définit comme "uneforme de publicité dans laquelle le consommateur contribue à lancer un produit ou un service via des courriels, des blogs, des forums ou d’autres médias en ligne et, par extension, une rumeur, un retentissement médiatique".

L’incontournable Web 2.0 fait aussi son entrée avec les mots composés dérivés de webtélé / webradio, le verbe poster (une note sur un blog) qui ne s’imposait pas, geek, e-learnig, e-book et IP (pour adresse IP).

Les expressions "faire pschitt", "être au taquet", "point barre" ou le stupéfiant "fumer la moquette" manquait évidemment pour rajeunir le toujours nouveau petit Larousse qui n’a pas une ride malgré son âge canonique.

On peut aussi s’étonner de ne voir apparaître qu’aujourd’hui le mot tsunami.

On peut s’interroger sur l’utilité de black-lister ou encore de pipolisation ou décohabiter.

Mais moi mon préféré c’est le joli verbe "cambaler" (variante "cambouler") qui, selon le Petit Larousse signifie en Provence transporter quelqu'un sur son porte-bagage. Je ne suis pas sûr que le petit Larousse soit remonté à l’origine du mot qui vient du cambalou, le bâton que les pèlerins portaient sur l'épaule et auquel ils accrochaient leur balluchon. Je ne crois pas non plus qu’il est noté qu’en argot marseillais se faire cambaler signifie être emmené au commissariat par les policiers.

Pour moi, marseillais, je connais plutôt l’expression se faire chaler pour se faire transporter sur le porte bagage. Mais il faudra attendre une autre édition pour corriger cette inacceptable lacune…

Patrice Leterrier

12 juin 2009

 

 

 

(*) Vertitude : Nom masculin inventé par moi pour désigner cette mode de mettre l’écologique au centre du débat politique

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11 juin 2009 4 11 /06 /juin /2009 11:42


A

près le parlement européen et l’amendement Bono qui disait qu’"aucune restriction ne peut être imposée aux droits et libertés fondamentaux des utilisateurs finaux sans décision préalable des autorités judiciaires" (dans le paquet télécom dont la France a bloqué l’adoption), voila le conseil constitutionnel qui renvoie la ministre, le gouvernement, et le président puisqu’il se dit responsable de tout, à une leçon élémentaire de droit et même à la déclaration des droits de l’homme.

Le Conseil constitutionnel a jugé que "le législateur ne pouvait, quelles que soient les garanties encadrant le prononcé des sanctions, confier de tels pouvoirs à une autorité administrative dans le but de protéger les titulaires du droit d'auteur. Ces pouvoirs ne peuvent incomber qu'au juge". Les sages rappellent aussi au gouvernement que "l'article 9 de la Déclaration de 1789 pose le principe de la présomption d'innocence duquel il résulte que la loi ne saurait, en principe, instituer de présomption de culpabilité en matière répressive".

Voici donc la loi recalée par les juges après avoir été recalée une première fois par l’assemblée Nationale à la suite d’une affaire qui avait mis en lumière un absentéisme éhonté des députés. Au passage on remarquera que ce sont ces mêmes députés qui font les gros yeux aux électeurs pour leur absentéisme aux urnes….

L’entêtement du gouvernement sur ce texte semble intact à écouter la ministre Christine Albanel. Elle devrait pourtant, avec son chef de gouvernement, dont on entend même plus le souffle, méditer cette vieille maxime romaine qu’on attribue parfois à Sénèque le jeune : "errare humanum est, perseverare diabolicum"

Car sa loi aboutira au mieux à un texte inapplicable puisqu’il mettra des moyens coercitifs manuels et limités face à une explosion de la diffusion qu’internet permet et que personne ne pourra arrêter sauf à faire comme en Chine et à rétablir la dictature de la pensée unique.

Il faudrait pour la rendre efficiente se doter de moyens de justice que l’on préférerait voir consacrer à vider les prisons des prévenus en attente interminable de jugements et qui au demeurant seraient mal venus dans la vague d’efforts que l’on demande aux français en cette période dite de crise (alors qu’il s’agit plus probablement d’un changement profond, durable et nécessaire de paradigme politico-économique).

Et comme le souligne Edwy Plenel sur son site Mediapart, la liberté dont il est question n’est pas une affaire de tuyau, comme dans le cas du journal il ne s’agit pas de papier ni d’encre, mais bien de contenu.

Priver un journaliste de papier et d’encre c’est lui interdire de diffuser librement ses idées, dans le cadre bien sûr de la loi mais dont seuls les juges sont susceptibles de statuer si elle est respectée.

Objection, me direz-vous ! Il faut bien punir le piratage.

Voire ! Il faut d’abord prendre acte que la course entre la technologie et la préservation des contenus artistiques est à peu prés perdue d’avance. Jérémie Zimmermann, fondateur du collectif la quadrature du net, souligne que "la classe politique est déconnectée des réalités sociales nouvelles et des avancées technologiques".

Le piratage est un délit uniquement parce que la copie est illicite ! La copie est illicite parce qu’on ne rémunère pas convenablement les artistes (à moins qu'il ne s'agisse en réalité du chiffre d'affaires des éditeurs...).

Comme la loi Hadopi, qui voulait renverser la responsabilité de la preuve, le modèle économique de protection des droits d’auteurs tourne à l’envers. Il faut construire un modèle économique qui prenne acte que la copie est inévitable, incontrôlable et au demeurant n’est pas la seule forme d’écoute avec la généralisation du streaming.

Il faut prendre acte que tout moyen coercitif visant à priver quelqu’un de son accès internet est contraire à l’évolution de notre société et aussi absurde que d’interdire d’acheter des journaux.

Il faut aussi prendre acte qu’une adresse IP n’est pas un attribut légal identifiant une personne et qu’en droit ce n’est pas l’arme que l’on condamne mais le coupable.

Il faut tout simplement réfléchir plus largement comment la démocratie peut intégrer internet dans son évolution vers plus de modernité, plus d’interactions, plus de libertés pour les citoyens.

Quel formidable outil pour élargir le champs des possibles au lieu d’essayer de faire des exemples par la sanction aveugle et donc injuste…

C’est un peu comme de vouloir seulement punir les mineurs délinquants et se masquer le problème de l’abandon coupable d’une partie de notre jeunesse égarée dans des bandes, emplâtres désastreux à la démission des parents, des éducateurs et plus généralement de la société.


Patrice Leterrier

11 juin 2009

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10 juin 2009 3 10 /06 /juin /2009 11:17


O

n parle des sondes, on identifie les cadavres, on ratisse le fond de l’océan et on spécule à tout vent….

Les hypothèses vont bon train : problèmes techniques, erreur humaine, attentat ou, tant qu’on y est, choc avec une météorite.

Mais qu’est-ce qui poussent les hommes à vouloir tout comprendre même en l’absence de tout moyen pour ce faire ? En l'absence de preuves confirmant ou infirmant telle out telle thèse, on est porté à la crédulité, à l'indignation, à l'inquiétude mais rarement à la réflexion.

Fabrice Clément, chercheur en sciences cognitives à l'Université de Genève, pose la question fondamentale de la psychologie de la crédulité : "Qu'est-ce qui provoque cet effondrement des capacités de jugement ?"

Il affirme que "devant des affirmations hypothétiques, le cerveau humain est placé face à une affirmation dont il ne peut vérifier rapidement la véracité. Sinon, il faudrait mener une enquête personnelle longue et laborieuse" et quelquefois impossible, comme dans le cas du crash de l’Airbus AF447.

Or, toujours selon lui, "la rapidité de décision est un paramètre essentiel dans la façon dont nous forgeons nos convictions. Qui plus est, l'esprit critique a tendance à s'affaiblir d'autant plus qu'une telle affirmation est reprise par beaucoup de personnes".

L’hypothèse retenue par le chercheur est donc que ce sont les mécanismes mêmes qui ont été sélectionnés pour que nous puissions bénéficier d’une représentation véridique du monde qui, dans certaines conditions, s’enclenchent pour nous faire accepter ce qui devrait faire l’objet d’un filtrage cognitif probablement inhibé par la dimension émotionnelle forte de l’événement.

Peut-on pour autant accuser les médias d’abuser sciemment de cette caractéristique de crédulité de l’homme ?

Si l’on applique le principe en vigueur en criminologie qui veut que l’on recherche d’abord celui ou ceux à qui profite le crime, il n’y a aucun doute sur la culpabilité des médias.

L’attitude de certains d’entre eux que ce soit dans la presse écrite, la radio, la télévision et/ou maintenant l’internet semble clairement dictée par un intérêt économique évident à laisser filtrer les spéculations à petites doses homéopathiques pour ensuite les délayer sans scrupule.

Les tirages s’en portent d’autant mieux que la recette est largement éprouvée par la presse people qui fait son fond de commerce des rumeurs plus ou moins extravagantes. A vrai dire il semble aussi que plus les explications sont énormes, incroyables avec un peu de jugeote, plus elles intriguent le lecteur et donc augmentent les tirages ou l’audience.

Les médias sont d’autant plus crédibles que, dans leur peur de conséquences commerciales désastreuses et en dépit des dénégations (mais qui croire une fois encore ?) du constructeur Airbus, Air France s’empresse de remplacer massivement les sondes de vitesse Pitot dont le dysfonctionnement semble avéré dans l’accident. On remarquera cependant que l’on ne sait pas, dans l’état actuel de l’enquête, déterminer clairement la cause de ce dysfonctionnement.

Certaines voix à contre courant de ce délire collectif s’élèvent pour clamer qu’il faut dans ce domaine, comme dans d’autres, raison garder.

Mais alors elles n’ont donc rien à dire sur l’événement ? Comment cela est-il possible dans ce maelstrom médiatique où il est de bon ton d’avoir un avis sur tout ?

Patrice Leterrier

10 juin 2009

 

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