Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 juin 2012 1 11 /06 /juin /2012 11:26

le doigt de dieu

S

ur son blog Passeur de Science, Pierre Barthélémy s’insurge contre une nouvelle offensive des créationnistes déclenchée en Corée du Sud.

A l’origine de leurs argumentations, les créationnistes jouent sur l’énorme ambigüité dans la compréhension du mot "théorie" par le grand public.

Le sens de théorie est souvent confondu avec celui d’hypothèse lui-même opposé à la compréhension intuitive de "certitude".

Il est vrai que le langage quelquefois abscons des scientifiques ne facilite parfois pas l’accès du grand public à leurs découvertes.

Il est vrai aussi que la notion de certitude en science reste tout de même une notion difficile à appréhender dans la mesure où la règle absolue de la réfutabilité conduit les plus malins des négationnistes à s’engouffrer dedans en confondant volontairement réfutabilité et doute systématique.

Réfuter une théorie, c’est apporter la preuve qu’il existe des expériences mesurables contredisant ou ne pouvant être expliquées par la théorie et non la mettre en doute au nom de croyances aussi respectables qu’elles soient (lorsqu’elles ne se mêlent pas de science).

Il est aussi grotesque de vouloir contredire le darwinisme à partir des textes sacrés que de vouloir attaquer les fondements de la foi religieuse à coup d’arguments scientifiques.

La réfutation d’une théorie comme celle de la gravitation universelle imaginée par Isaac Newton conduit souvent à l’englober dans une vision plus large. Elle reste «vraie» à une certaine échelle de mesure.

Ce n’est pas toujours le cas. Sans faire référence à la théorie de l’évolution qui balayait les conceptions anciennes sur l’origine des espèces (si on exclut la vision transformiste de Jean-Baptiste de Lamarck), Il suffit par exemple de suivre l’histoire de l’explication de la circulation sanguine à travers les âges et les bêtises racontées par Descartes, qui pensait que la chaleur du cœur qui étai t la cause des battements cardiaques, à l’époque où Willian Harvey décrivait la circulation et le rôle du cœur.

Les neutrinos "supraluminiques" annoncés hâtivement et à tort par la coopération OPERA auraient conduit à chercher à minima un complément à la théorie de la relativité.

Cette belle construction mathématique d’Albert Einstein n’a jusqu’à présent jamais été contredite.

Les scientifiques continuent à en explorer les conséquences par les expériences de plus en plus difficiles à appréhender par le grand public comme la récente (Septembre 2011) vérification par des astronomes danois du décalage vers le rouge de la lumière sous l’effet de la gravitation.

Ces digressions sur la notion de théorie pour illustrer qu’une théorie scientifique n’a jamais vraiment le statut de certitude absolue (si tant est que cela existe) mais simplement celui de modèle explicatif de la réalité, s’appuyant sur un ensemble d’hypothèses cohérentes, nécessaires et suffisantes, qui rend fidèlement compte des observations que l’on peut faire et conduisant à des prédictions vérifiables.

C’est une explication détaillée de quelque aspect de la nature, supportée par un vaste corpus de preuve qui n’a rien à voir avec une croyance religieuse s’appuyant sur un à priori indémontrable par nature.

A Napoléon, qui lui faisait remarquer qu’il n’était nulle part fait mention de Dieu dans son ouvrage la "Mécanique Céleste", Laplace répondit "je n’ai pas eu besoin de cette hypothèse".

Charles Darwin n’en avait pas plus besoin pour écrire "On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life" et n’en déplaise aux créationnistes l’hypothèse de Dieu n’apporte toujours rien à la compréhension scientifique de nos origines.

Paraphrasant Marcel Proust qui disait "les faits ne pénètrent pas dans le monde où vivent nos croyances", on peut dire que le monde irait mieux si les croyances ne se mêlaient pas du monde où vivent les faits.


Patrice Leterrier 

11 juin 2012

Fichier PDF

Partager cet article
Repost0

commentaires

A
Que voilà une saine remise en place !<br /> De la différence entre l'agnostique et l'athée...
Répondre
A
merci pour ces explications trés claires.
Répondre