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26 mai 2009 2 26 /05 /mai /2009 09:00

 

 

L

a France s’apprête à diffuser sur les paquets de cigarettes des images choquantes illustrant les dangers du tabac. La preuve n’est pourtant plus à faire de l’inefficacité de ce type de dissuasion. Tout le monde sait que le tabac est une drogue comme les autres. Elle induit chez des sujets fragiles des conduites addictives que l’on ne guérit pas par la peur du danger.
Les schizophrènes sont dangereux, les consommateurs de drogues sont des délinquants, les fumeurs doivent être culpabilisés, les alcooliques comme les drogués et les fumeurs n’ont que la répression de la société comme perspective face à leur maladie, les déprimés sont fuis comme la peste et finissent souvent par perdre leurs emplois et se suicider. Les jeunes en bandes organisées qui attaquent les braves gens dans les métros doivent être sévèrement punis et mis en prison dont tout le monde connait le caractère hautement éducatif. Les automobilistes, victimes de l’incohérence totale de la signalisation routière, doivent payer le prix fort en monnaie et en points sur leurs permis(1).
Il ne s’agit évidemment pas de faire l’éloge des conduites addictives, ni de cautionner des chauffards inconscients ni d’excuser, au prétexte de la carence des parents et du manque de structures adaptées, les adolescents violents en bandes organisées.
Mais que devient une société qui se soucie à ce point de la sécurité des "bons" citoyens qu’elle est prête à exclure ceux qui n’ont pas eu la possibilité, la force ou simplement l’opportunité de s’insérer "normalement"?
Pourquoi abuser la population en la terrorisant avec l’image du fou dangereux avec une sur médiatisation manipulatrice de drames liés à des schizophrènes, certes très violents et insupportables mais rarissimes alors que la psychiatrie est devant un problème grave de manque de moyen et de structure.
Pierre-André Michaud, interviewé par Cerveau & Psycho, sur la violence des bandes de jeunes, condamne la loupe médiatique utilisée pour traiter du sujet. Il insiste sur la nécessité de "dire et redire ce que tous les spécialistes savent, dans la majorité des cas, la violence naît de l’absence d’avenir et d’insertion professionnelle". Il ajoute qu’"il est assez hypocrite de dire qu’il faudrait plus de tempérance, que les ados se contrôlent davantage, alors que tout les incite à acheter, a rechercher des sensations, à vivre sans limites".
Que dire de l’acharnement à réprimer ou à culpabiliser les victimes de conduites addictives qui sont des malades, comme les dépressifs mais aussi comme les tuberculeux, les diabétiques, les cardiaques ou les cancéreux. A l’extrême difficulté à vivre dans laquelle ils sont plongés du fait de leur dépendance, la société ajoute l’opprobre et la répression. Ils sont traités comme les pestiférés des temps modernes, exclus autant par la société que par leur maladie.
Je passerai sur la répression des automobilistes bien qu’elle participe à la volonté de l’état de montrer sa rigueur pour assurer la sécurité des citoyens et aussi à remplir les caisses de l’état.
On nous bassine, quelquefois à juste titre, sur les dangers des antennes des opérateurs et les téléphones portables. On dépense des sommes astronomiques sur les sujets très sérieux du réchauffement de la planète, des OGM, des pollutions industrielles. Mais on laisse, sans aucun remord, une partie de notre jeunesse sombrer dans la violence, la drogue et la délinquance alors qu’une société qui néglige sa jeunesse se condamne aussi sûrement que si elle négligeait son environnement.
On se vante d’avoir rallongé l’espérance de vie (ou la désespérance ?) de nos compatriotes. Mais on laisse sans soin, ou encore pire on incarcère, des pauvres gens victimes de leurs maladies qu’elles s’appellent toxicomanie ou alcoolisme.
L’état paradoxe atteint son summum d’incohérence ou de cynisme (puisqu’il est censé responsable et éventuellement coupable de ses actes) en accumulant les profits de la vente du tabac tout en culpabilisant les consommateurs de cette drogue légale.
Mais qu’importe pourvu que la majorité silencieuse ait le sentiment d’être protégée contre les gênants rebus de la société aussi insupportables que ces réfugiés clandestins qui n’ont qu’à retourner chez eux bien sûr.

Patrice Leterrier

26 Mai 2009

 

(1)     par décret du 29 novembre 1990  la vitesse est limitée à 50 km/h en agglomération et la notion de zone 30 est créée. La notion d’agglomération s’applique aussi bien sur la rase campagne qui précède l’entrée dans l’agglomération, les doubles voies de dégagement que sur le centre ville. Les véhicules n’ont évidemment pas changé depuis 18 ans!

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